Loving, Amour Contre Ségrégation au Festival de Cannes

Ruth Negga & Joel Edgerton © Ben Rothstein © Big Beach, LLC

Loving de Jeff Nichols raconte, dans un film émouvant tout en pudeur, le combat de Mildred et Richard Loving contre une loi interdisant le mariage interracial.

Loving débute dans le Conté de Caroline en Virginie. A Central Point, blancs, noirs et indiens vivent ensemble, tout naturellement. Mildred et Richard s’aiment et se marient mais, voilà, en Virginie: « Le moineau ne se marie pas au rouge-gorge, c’est la loi de Dieu »… Comme elle est Noire et lui est Blanc, vivre ensemble les mènera en prison, puis à l’exil à Washington. Pour faire triompher leur droit à s’aimer en liberté, ils risqueront d’être arrêtés à nouveau avant que la Court Suprême des États Unis ne s’intéresse à leur cas.

Mildred & Richard© Ben Rothstein © Big Beach, LLC

Arrêtés et condamnés à la prison

Dans l’Amérique en 1958, les premières fusées s’élancent vers le firmament à 37 000 km/h, mais seize états s’opposent à ce que Blancs et Noirs se marient et vivent ensemble. Mildred (Ruth Negga) et Richard (Joël Edgerton) s’aiment et la jeune femme est enceinte. Ils décident de se marier à Washington et Richard s’apprête à construire leur maison sur le terrain qu’il vient d’acheter.
Une nuit, le couple est arrêté et condamné à une peine de prison. Leur avocat obtient du juge une suspension de la sentence à condition que les amoureux quittent l’État de Virginie. Installés à Washington, ils sont à nouveau arrêtés quand ils retournent au pays pour que la mère de Rich, sage-femme, accouche Mildred de leur premier enfant, Sidney.

Lettre à Robert Kennedy

Au début des années 60, les Noirs manifestent de plus en plus en masse pour réclamer leurs droits. A Washington, Mildred considère la situation de son couple comme une violation de leurs droits civiques et écrit une lettre à Bobby Kennedy, alors procureur général des États Unis. Bobby Kennedy transmet le cas à l’Union Américaine pour les Libertés Civiles qui mandate un avocat, Bernard Cohen (Nick Kroll) puis un second pour les aider.
Pour faire avancer les choses, le couple retourne en Virginie, risquant à tout moment d’être arrêtés à nouveau. leur combat, suivi par les media les conduira devant la Cour Suprême des États Unis.
En 1967, dans une décision historique, les neufs juges de la plus haute instance juridique se prononcent à l’unanimité contre la décision de la Virginie, abrogeant ainsi de fait les lois anti métissage au niveau national.

Jeff Nichols & Joel Edgerton © Ben Rothstein © Big Beach, LLC

Mise en scène axée sur les visages

A travers la longue quête d’un couple mixte pour s’aimer en liberté, Jeff Nichols raconte un moment fondateur de l’Amérique moderne. L’arrêt Loving v. Virginia symbolise le « droit de s’aimer pour tous, sans aucune distinction d’origine », une décision qui a modifié la Constitution américaine.
L’idéologie et la haine sont absentes du film de Nichols, et les personnages de la « Loving Story » n’expriment jamais violemment leur frustration.
Par le jeu tout en pudeur et en retenue des acteurs, enrichi de silences « parlants », avec une mise en scène axée sur les visages, une intense émotion jaillit de ce portrait de la vie quotidienne intime d’américains modestes et stoïques, dont le souhait est de vivre en paix chez eux et élever leurs enfants dans un environnement sûr.
Loin des codes Hollywoodiens, le réalisateur de Take Shelter (Grand Prix de la Semaine de la Critique en 2011), Mud (en Compétition en 2012) et Midnight Special (en compétition à Berlin), a le secret des scènes fortes, en synergie émotionnelle entre elles, sans débauche de moyens ni fioritures.

Ruth Negga, aux grands yeux expressifs, dont c’est le premier rôle majeur dans un long métrage, est la première révélation du Festival de Cannes 2016.